Catherine VAUTRIN, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités a présenté le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie à l’occasion du Conseil des ministres du mercredi 10 avril 2024.
Ce projet de loi, très attendu, fait suite à de nombreuses interventions du législateur durant ces vingt dernières années, pour affirmer la prise en considération de l’autonomie et du choix du patient en fin de vie et consacrer le principe du respect de sa dignité.
Notre pays a beaucoup progressé grâce à ces évolutions successives mais, force est de constater, qu’elles ne répondent pas à toutes les situations tel que l’a précisé le Comité consultatif national d’éthique ainsi que l’Académie nationale de médecine.
Ces constats ainsi que les revendications sociétales, renouvelées par les membres de la Convention nationale sur la fin de vie, appellent une réponse qui implique de concilier :
- D’une part, notre devoir de solidarité envers les personnes les plus fragiles parce que gravement malades, en prenant des mesures fortes en faveur des soins palliatifs et d’accompagnement ;
- D’autre part, le respect de l’autonomie de la personne en ouvrant la possibilité d’accéder à une aide à mourir, afin de traiter les situations de souffrance intenable que rencontrent certaines personnes dont le pronostic vital est engagé de manière irrémédiable en raison d’une maladie grave et incurable.
Depuis 2002 également, le législateur a voulu progresser dans la réponse au besoin d’accompagnement des malades pour la prise en charge de la douleur ou de soins palliatifs.
C’est à ces deux enjeux que le texte actuel souhaite répondre : intégrer dans la législation les cas qui n’étaient pas traités jusqu’à présent et offrir partout sur le territoire des soins adéquats à la fin de vie.
C’est pourquoi le texte est fondé sur deux titres, le premier relatif « aux soins d’accompagnement et aux droits des malades » et le deuxième relatif à « l’aide à mourir ».
De ce fait, il dessine un cadre permettant un point d’équilibre entre le renforcement de l’accompagnement des patients et de leur entourage et l’ouverture d’une aide à mourir pour des personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables induisant des souffrances insoutenables et réfractaires aux thérapeutiques.
Pour autant, et pour prévenir tout risque de dérapage, le texte prévoit des conditions strictes d’accès à l’aide à mourir ainsi qu’une procédure et un contrôle protecteur des personnes concernées et des professionnels de santé.
La France renforce ainsi la prise en considération du principe d’autonomie tout en veillant à protéger les personnes, c’est-à-dire à assurer le non abandon et l’accompagnement des plus vulnérables, expression emblématique « de notre solidarité et de notre fraternité », tel que souhaité par le président de la République.
S’agissant du second volet du projet de loi, la ministre a présenté la stratégie décennale des soins d’accompagnement, pour le renforcement des soins palliatifs, de la prise en charge de la douleur et de l’accompagnement de la fin de vie.
Cette stratégie décennale porte l’ambition de bâtir un modèle français des soins d’accompagnement, alors que la France n’est aujourd’hui pas pleinement au rendez-vous de l’enjeu d’accès universel aux soins palliatifs puisque 20 départements ne disposent pas encore d’unité de soins palliatifs.
Cette stratégie porte trois évolutions majeures pour notre système de santé et notre société :
- Favoriser une prise en charge anticipée des malades chroniques ;
- Renforcer l’accompagnement des patients, au-delà des aspects médicaux, par l’ouverture à d’autres dimensions (sociale, psychologique, spirituelle, attention à l’entourage) et le plus proche possible de leur domicile ;
- Soutenir, avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, l’émergence d’une filière de formation universitaire en médecine palliative, ce qui est indispensable pour engager l’effort décisif de formation qu’il est nécessaire de déployer rapidement.
Ces trois évolutions intégrées à la stratégie décennale de développement des soins d’accompagnement permettent de dégager un modèle français des soins d’accompagnement, prenant en compte les spécificités de notre pays.
Un investissement décisif débutera dès cette année à hauteur de 1,1 milliard d’euros de mesures nouvelles, soit une hausse de 66 % des moyens alloués aux soins d’accompagnement sur la période 2024-2034, pour répondre à une hausse de 16 % des besoins.
Ainsi la dépense publique de soins palliatifs, de 1,6 milliard d’euros en 2023, passera à 2,7 milliards d’euros en 2034, avec une forte impulsion sur ces trois prochaines années.
Cette stratégie portera des progrès très concrets, pour les patients, pour les professionnels de santé et pour leurs proches :
- Chaque patient devra se voir proposer dès le diagnostic de la maladie grave un plan personnalisé d’accompagnement pour une prise en charge sur-mesure ;
- Une attention forte sera portée à la prise en charge des enfants avec la création de 17 unités de soins palliatifs pédiatriques, soit une par région
- Tous les départements verront leur offre de soins palliatifs renforcée avec la création d’unités pour la prise en charge complexe dans les 20 départements qui en sont dépourvus, le renforcement de l’hospitalisation à domicile (HAD), et la création de 100 nouvelles équipes mobiles territoriales ;
- Des maisons d’accompagnement seront créées ;
- Une attention particulière sera portée sur le renforcement de l’accompagnement par les bénévoles et le développement des collectifs d’entraide visant à encourager l’engagement de nos concitoyens ;
- 100 postes de chefs de clinique (dont 10 dès début 2024) et 100 postes d’universitaires titulaires seront créés et sera mis en place un diplôme d’études spécialisées en médecine palliative et soins d’accompagnement.
L’ensemble de ces mesures créent une approche spécifique de la fin de vie. Le Gouvernement est pleinement engagé dans le déploiement de la stratégie de soins palliatifs, ce qui est une excellente nouvelle.
Le Parlement sera saisi rapidement de ce texte et nous aurons un travail de fond important à effectuer pour assurer aux citoyens que la loi qui sera votée à l’issue des débats réponde à l’ensemble des situations auxquelles nous sommes confrontés.